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  • dimanche 28 septembre 2025

    Journal de bord 29/09/2025 Claustrophobie créative, désordre domestique, évasion parisienne.

    “La liberté se savoure mieux à table que sur l'herbe.”

    Chloé a enfin pris le temps de capturer notre modeste appartement lausannois pour vous le présenter. Bien que cet espace ait son charme, je me trouve confrontée à un dilemme qui me ronge : l’heure du coucher. La chambre, étriquée à l’extrême, me donne la désagréable sensation d'être emprisonnée dans un cercueil. Je ne me savais pas autant claustrophobe.

    Il m'est indispensable de me battre pour que Chloé prenne enfin conscience de l'importance de ranger son matériel après le travail. Sans cela, je me retrouve, inévitablement, à vivre à travers un champ de pinceaux, d'éclats de peinture et d'esquisses, témoins d'une créativité qui envahit notre espace commun. Cette lutte, bien que souvent vaine, est une forme de résistance face à un désordre qui menace non seulement mon environnement, mais aussi la clarté de ma pensée, sans compter les nuisances olfactives.

    Nous allons ensemble relever notre boîte aux lettres à intervalles réguliers, deux jours durant, car à Lausanne le facteur passe cinq fois par semaine. Il y a là quelque chose de moralement ambigu dans l’acte même : il est malaisé d’aller chercher ce courrier sans qu’une tentation insidieuse nous vienne en tête – jeter un regard sur les travaux de notre appartement –. Et pourtant nous voulons la surprise entière ; c’est pourquoi nous ne cédons pas et c'est aussi pourquoi nous le faisons à deux, dans une sorte de compagnonnage des choix.

    J’ai reçu une bonne nouvelle : j’ai enfin mes notes de sortie externat de mes études de médecine en France. Je termine 3ᵉ sur 9 455 candidats et à 2 dixième du second et 5 dixième du premier. Ce n’est pas mal, me direz-vous ; mais ce n’est pas ce qui compte. L'important est la prochaine étape : tenter de réaliser une bonne première année d'internat.

    Revenons à notre week-end parisien :

    Nous avons quitté Lausanne le vendredi matin à l’aube, à 8 heures précises, avec l’impatience d’un voyage en quête de liberté. C’est avec une douce excitation que nous avons parcouru les routes, avant d’atteindre notre destination, le garage, à 16 heures. Là, nous avons enfin échangé nos véhicules pour recevoir notre belle Tilomobile sportive, symbole de notre désir d’évasion et d’aventure.

    Notre week-end à Paris fut une célébration du beau, un véritable souffle d’art aux inspirations vivifiantes. Il est amusant de constater que nous avions l’air d'être de véritables touristes. Nous avons pris place dans notre restaurant chéri, La Dame de Pic, où nous avons choisi un menu en quatre séquences. Cette décision, bien que motivée par l’envie de ne pas trop nous attarder à table, mais cela n’a pas diminué notre émerveillement face à cet établissement, toujours aussi chaleureux, où le champagne offert pour accompagner notre dessert est toujours touchant. Ah, quelle belle Maison ! où l'on fait attention à sa clientèle, ses habitués et ses amis.

    Nous avons ensuite déambulé au musée Maillol, y découvrant une exposition photographique dédiée à Robert Doisneau. Même pour la béotienne que je suis, l'exposition se révèle d'une grande réussite. Les clichés, empreints d’une mélancolie douce, peignent une humanité souvent tragique, mais jamais désespérée. Il nous transporte dans les années 1930, dans les ateliers de Renault, où la dureté du quotidien des ouvriers se fait sentir. Doisneau nous convie à partager des instants d’humanité, parfois sombres, mais d'une beauté poignante. Perso j'ai adoré l'expo.

    Plus tard, notre visite au musée d'Orsay, consacrée à John Singer Sargent, nous a plongées dans l’univers complexe de cet artiste du XIXᵉ siècle. Lui aussi, à l’instar de moi, a connu une vie tumultueuse : peintre américain né en Italie, il a laissé son empreinte à Paris, fréquentant l’École des Beaux-Arts (comme ma chérie), avant de s’éteindre à Londres.

    Pour le retour sur Lausanne, nous avons pris la route avec notre Tilomobile. Je suis arrivée épuisée, après près de six heures et demie de route, mais le cœur empli de souvenirs précieux et demain je serai prête à reprendre mon service.

    A vous tous, je vous souhaite une excellente semaine.

    A Bientôt,
    Chlo & Til 


    dimanche 21 septembre 2025

    Journal de bord 22/09/2025 Equilibre, Evasion, Dédale.

    “La liberté se savoure mieux à table que sur l'herbe.”

    Nous éprouvons une joie profonde à l'idée de ne pas être séparées cette semaine. Dimanche soir, je monte avec Chloé à Paris, espérant m'immerger à nouveau dans l'effervescence de cette ville. Après ma première garde comme interne le week-end, un répit de deux jours supplémentaires de repos m'est accordé ; je serai donc à Paris pour accueillir notre nouvelle voiture. De plus, le garage a eu l'amabilité de me laisser un mot pour que je ramène le véhicule de complaisance. C'est donc en voiture que nous remonterons à Paris.

    La vie à Lausanne nous offre une douceur d'adaptation, et nous réalisons que le lac devient un aimant (sans jeu de mots) pour nos moments de loisir. Dès que l'occasion se présente, nous nous adonnons à notre running matinal, flânons sur les rives, et, contre toute attente, j'ai même cédé à l'idée d'un pique-nique sur les bords du lac.

    Quoi ? Un pique-nique ? Ne serais-je point devenue folle ? Voilà un acte qui témoigne de mon affection pour Chloé, car je dois avouer que cette perspective m'horripile profondément. Oui, ma chérie, dans un élan de dévouement frôlant le masochisme, a eu l'idée lumineuse d'organiser un pique-nique, comme si cette aventure champêtre pouvait atténuer le cruel contraste entre le tumulte parisien et la placidité lausannoise. Finalement, quoi de mieux pour célébrer le calme que de se pourrir la vie ?

    Comment apprécier le désagrément de trimbaler une glacière, des couverts, des serviettes, des gobelets, sans oublier la nappe, et, ah, ce que nous avons malencontreusement omis ? C'est une véritable expédition, un périple que je n'ai pas demandé.

    Sans vouloir passer pour la rabajoie de service, pourquoi compliquer notre existence ? Il suffirait de commander à emporter et de déguster notre repas dans le confort d'une chaise, loin des tracas du plein air.

    Et que dire de l'impossibilité de se laver les mains avant de déjeuner ? Manger assise par terre, telle une bohémienne, c'est inévitablement inconfortable. On finit par avoir des fourmis dans les jambes, car, oui, ces petites créatures ignorent que nous n'avons pas le droit de monter sur la nappe qui est sur l'herbe. Ajoutez à cela des sandwiches mal préparés, souvent synonymes de nourriture froide et de miettes envahissant le sac. Quel délice !

    Le soleil qui tape, c'est le bouquet final. Il attire les mouches autour de notre pitance, et la perspective d'une invasion d'insectes indésirables transforme notre repas en un véritable buffet pour ces nuisibles, qui semblent toujours savoir quand je suis la moins vigilante pour organiser leur open bar sur ma petite personne.

    Et quelle belle surprise qu’une eau tiède comme boisson, avec un bon rosé bien brassé dans le sac ! Que dire de cette nature qui se moque de nos besoins élémentaires ? Pas de commodités, pas de toilettes. Si l'on doit se laver les dents après le repas, c’est dans des conditions précaires, comme ces Romani qui inondent l'Europe de leur crasse. Non, vraiment, je ne comprends pas.

    Mon esprit d'aventurière se limite à la lecture des récits de Jake Barnes. Si vous ne le connaissez pas, il s’agit d’un personnage d’Ernest Hemingway dans son roman The Sun Also Rises, que l’on traduit par Le soleil se lève aussi. Bien que cette œuvre ne soit pas de la littérature "raisinée" – elle date des années 1930 –, elle dépeint la vie d’un groupe d’expatriés américains et britanniques à Paris.

    L'incompréhensible devient flagrant lorsque l'on réalise qu'il existe tant de beaux établissements au bord du lac. Chloé me dit : « Le pique-nique, c'est la liberté. » Ah, la liberté… Je préfère encore la liberté d’un repas bien servi, sans le chaos de la nature et ses petites joies.

    Chloé et moi avons pris la résolution de nous aventurer vers la "maison olympique", un lieu qui, bien que nous le sachions, était chargé d'une promesse de souvenirs sportifs. En vérité, les musées commencent à nous manquer, ces sanctuaires de la mémoire collective où se mêlent passé et présent. Nous choisissons celui-ci, non pas pour son contenu, mais pour sa proximité avec l’appartement qui nous est prêté.

    Avant de pénétrer dans cet espace, j’ai dû céder à cette coutume moderne de capturer l’instant, me retrouvant figée, sous l’arc de la porte, piégée par l’objectif de Chloé, qui paraissait soudainement inspirée par une muse artistique. Cela me rappelle combien notre époque valorise l’image au détriment de la réalité.

    Ce musée, consacré à l’histoire des Jeux, tisse un fil invisible entre l’Antiquité et la modernité. Il propose une rétrospective sur Pierre de Coubertin, cet homme passionné qui, par ses efforts, a sublimé le sport en un emblème de l’ambition humaine et d’une quête philosophique. À travers les vestiges de la Grèce antique, on saisit que le jeu dépasse la simple compétition, se transformant en une véritable célébration du corps et de l’esprit.

    Bien que ce musée ne figure pas parmi mes préférés, il offre une invitation à méditer sur la nature même du jeu et son rôle dans notre existence quotidienne. Le prix d’entrée, cependant, s’élève à 20 CHF, ce qui semble démesuré pour une telle expérience. Il n’est point nécessaire de recourir à un guide ; l’essence du lieu se dévoile à ceux qui prennent le temps d’observer. Il est vrai que j’ai presque préféré la quiétude des jardins au bord du lac Léman, où le souffle de l’eau et le chant des oiseaux résonnent bien plus agréablement que les échos des compétitions passées.

    Il est également appréciable de vivre ici dans un cadre sonore moins oppressant qu’à Paris, entourées de personnes civilisées. Quelle merveille ! Nous n'avons pas encore été importunées dans la rue, ni confrontées aux sifflements déplacés, aux « Eh mademoiselle » ou à d’autres manifestations désagréables. Cela nous rappelle la délicatesse des relations humaines, bien rare dans mon pays d'origine.

    Je commence à trouver un charme inattendu dans la comédie politique française, une source inépuisable d’amusement et de réflexions. Les discours du Premier ministre sortant, à l’image des élucubrations de Macron, illustrent cette habileté à narrer l’absurde avec une telle maîtrise qu’il en devient impensable de déceler la supercherie. Cinq Premiers ministres de deux ans, là nous en sommes plus à mettre des remplaçants, mais le personnel de la buvette. Se proclamer experte en politique française est un exercice délicat, tant le paysage évolue avec une rapidité déconcertante. À chaque réforme, la France semble suspendre son souffle, comme si le simple murmure du changement pouvait perturber l’ordre établi. Mais non, le roi Macron tient bien les rênes de cette dictature.

    Ce qui m'irritait autrefois m’amuse aujourd'hui. Plutôt que de débattre de l’éducation sexuelle dès l’école primaire, les Français gagneraient peut-être à explorer les méandres du surréalisme, cette échappatoire à la réalité morose. Peut-être que, dans ce surréalisme, le petit peuple de Macron trouverait un semblant d’évasion.

    Cependant, j’aspire à éviter le cynisme (si, si, enfin pas toujours…). Peut-on réellement rire de tout ? Cette question me fatigue, car elle n’est qu’un mensonge déguisé en idéal intellectuel. Si l’on rit de tout, alors, par un paradoxe amusant, on ne rit de rien. Tout devient drôle, tout devient triste, et la légèreté se heurte à la profondeur de nos expériences. La vie, finalement, est un équilibre fragile entre le rire et les larmes.

    A vous tous, je vous souhaite une excellente semaine.


    A Bientôt,
    Chlo & Til 

    dimanche 14 septembre 2025

    Vacances 2025 (3ᵉ partie) Résilience, Complicité, Équilibre.

    “Dans chaque instant partagé, se tisse la résilience de l'amour.”

    Chloé nage dans un bonheur qui lui est aussi naturel qu'à un poisson dans son élément. Retrouver le télétravail et son rôle de maîtresse de maison lui apporte une joie immense, et pour ma part, je ne peux que m'en réjouir, car c'est elle qui s'occupe de l'intendance de la vie quotidienne. Cependant, il subsiste quelques ombres dans ce tableau idyllique : la petitesse de notre appartement temporaire et cette séparation inéluctable que nous subissons chaque dimanche soir. Mais cela est le prélude à nos retrouvailles plus chaleureuses.

    J'ai pris conscience, lors de cette première semaine, qu'il me faut un temps de répit après le travail. Mon rôle exige de moi une attention constante devant l'écran, où je dois appréhender dans son entièreté le tableau des situations médicales que j'affronte chaque jour. Il est impératif que je consigne minutieusement mes observations dans les dossiers médicaux. Je m'efforcerai de gérer mon temps efficacement, mais la tâche est ardue. Lorsque je suis hors service, je jouis d'une tranquillité relative, moins perturbée par mes responsabilités et mes collègues. Il me faut réorganiser ma méthode afin d'optimiser l'ergonomie de mes dossiers informatiques. Ce qui m'insupporte le plus, ce sont ces tâches administratives que je dois accomplir, une perte de temps qui semble si éloignée de l'essence même de la médecine. Pourtant, je n'ai guère voix au chapitre, car chaque heure que je consacre à ces obligations sera rémunérée comme une heure supplémentaire.

    Cette semaine, nous avons acquis deux vélos électriques, un pour chacune de nous, affirmant ainsi notre souhait de contribuer, à notre modeste échelle, à la préservation de notre chère planète. Je vous en prie, n’en riez pas. J’ai essayé d’y mettre du style, d’ériger un discours éloquent pour vous impressionner et vous plonger dans une douce rêverie, mais je ne suis pas certaine d’y être parvenue. Bon, d'accord. Quoi qu'il en soit, nous avons décidé de favoriser le vélo pour nos trajets urbains. Pour ma part, c'est le moyen idéal pour me rendre à mon travail, sauf bien sûr lors des jours de pluie, de neige, ou lorsque le vent souffle trop fort, et, admettons-le, lors de ces moments où la fatigue me ronge. Mais je plaisante, car la distance qui me sépare de l'hôpital est courte, et le vélo, en vérité, se révèle être la solution la plus adéquate.

    Fin du récit de nos vacances 2025

    En entrant dans l'antre des grands-parents de Chloé, un souffle de légèreté m'a envahie, bien que les échos des récents événements continuaient de résonner en moi, comme des ombres obstinées. À notre arrivée, une douce surprise nous attendait : Charlotte, la sœur de Chloé, accompagnée de sa petite famille. Chaque sourire échangé, chaque interaction dans ce rassemblement exigeaient de moi un contrôle de mon esprit, alors que la tristesse se mêlait à l'émotion et que des larmes traîtresses se glissaient sur mes joues, témoins d'une fragilité à fleur de peau.

    Quelle chance inouïe de me retrouver entourée de deux photographes, comme si la présence de Chloé seule ne suffisait pas à apaiser mon cœur en proie aux tourments. Seule Charlotte, avec son audace et son esprit libre, parvient à m'inciter, lors de ses séances photo, à adopter des attitudes que, en raison de mes principes, j'aurais normalement repoussées avec véhémence. Pourtant, le résultat procure une immense joie à Chloé. Elle parvient à me pousser à transcender mes blocages et à affronter mes peurs, bien que je ne puisse dissimuler la lutte intérieure que représente pour moi ce lâcher-prise. Apprendre à m’aimer, à accepter cette part de moi-même, s'apparente à un combat acharné, un chemin que je peine encore à arpenter pleinement.

    Le grand-père de Chloé, fin psychologue à la bienveillance touchante, a exprimé le désir d’un moment en tête-à-tête, une parenthèse pour alléger le poids de ma souffrance intérieure. Peut-être Chloé leur a-t-elle soufflé quelques mots à ce sujet. Nous avons donc descendu les ruelles animées de Nice, attirés par l'appel d'un verre partagé, un moment de répit pour échanger sur les drames familiaux qui se profilent à l’horizon, mais aussi sur les belles épreuves qui nous attendent en Suisse. Il m’a rappelé avec une certaine douceur que cette année est particulièrement chargée pour moi, marquée par la fin de mon externat, l'examen final, le déménagement, et l'éloignement de mes parents — qui, d’après lui, n’est pas aussi anodin que je le crois — impliquaient qu'il était essentiel de lâcher prise sur mes exigences, de m'accorder le repos nécessaire et de reconnaître que, même dans notre quête de perfection, la vie nous réserve toujours des moments difficiles à traverser. Il est indubitable qu'avec Chloé, cette réalité se double d'une charge supplémentaire. Presque avec une tendresse palpable, il a fini par me faire une déclaration d'amour, en affirmant : « Mais vous deux, vous êtes d'une beauté rare, et ensemble, vous formez un couple empreint d’un amour authentique. »

    Pendant ce temps, Chloé, elle, restée chez ses grands-parents, se laissait emporter par les rires de sa nièce et de son neveu. Ce moment de répit m’a fait du bien, m’a permis de relâcher un peu la pression, et, rétrospectivement, d’apercevoir avec lucidité que, pour l'heure, la mort n’avait pas encore frappé à notre porte.

    Les enfants, avec leur candeur et leur insouciance, offrent un éclat de joie au monde. L'atmosphère était empreinte de festivité, et Clémentine (nièce de Chloé), pleine de curiosité, a cherché à engager une conversation prolongée et sérieuse avec moi. Son intérêt pour notre relation, celle que j'entretiens avec sa tante, était palpable. Après tergiversation, elle est parvenue à me poser la fameuse question, innocente mais percutante tout de même : « Comment je sais que je suis lesbienne ? » Répondre à une enfant de huit ans à une telle interrogation s'avère délicat. Ma réponse fut une réponse de Normand. « En vérité, je n'ai jamais eu à me poser cette question. Je le suis, voilà tout. » 

    Charlotte a nourri le désir ardent de réaliser un shooting à Cannes, ce lieu emblématique où la lumière danse avec la mer mais surtout les plages ont du sable fin contrairement à Nice où ce sont des galets. Nous nous sommes levées aux aurores, emportées par cette quête de l'image parfaite (comment ne pas sourire à ce moment ?). Chloé a choisi de nous accompagner, désireuse de capturer elle aussi des instants fugaces et de bénéficier des conseils avisés de sa sœur. Heureusement le grand-père de Chlo avait acheté des pains au chocolat pour me remonter le moral.

    Bien que Chloé ait déjà arpenté le chemin des stages professionnels en photographie, Charlotte se distingue, éclatante, au sein de cette élite artistique. À travers les années, j’ai souvent ressenti l'impératif de me soumettre aux exigences de Charlotte ou de Chloé, à leurs divers appareils qui ne cessent de cliqueter, un écho constant de leur passion. Et cette dynamique semble perdurer. Si le fait de me transformer en une simple plante verte peut leur apporter du bonheur, je suis prête à m’exécuter, avec une bonne grâce empreinte de résignation (malgré tout). 

    Je les observais échanger sur les clichés capturés par Chloé, tandis que Charlotte, avec une bienveillance éclairée, lui prodiguait des conseils pour sublimer son art. C'est toujours un bonheur d'être à l'origine de la complicité entre deux sœurs. En cet instant, c'est moi qui ai gravé des images précieuses dans mon cœur.

    Nous avons passé des moments agréables en famille chez les grands-parents de Chloé, bien que mon moral soit en proie à des oscillations, avec des ombres sur ces instants de joie, et que grand-père va devoir revoir sa cave à vin s'il ne veut pas me voir pleurer.

    Dernière semaine de vacances à la maison de campagne de mes parents, à Ramatuelle. Ce doux refuge m’a permis de défier les conventions, de m’abandonner à mes instincts les plus primaires : me nourrir comme un ogre, boire comme un marin enivré à ne plus savoir si l'on dit un sous-marin ou un marin-saoul, et sombrer dans un sommeil profond, semblable à celui d’une marmotte en plein hiver. La chaise du jardin, complice silencieuse, a fini par épouser la forme de mon corps, créant une créature hybride, à la fois humaine et végétale. Le grand-père de Chloé a raison. Il était essentiel pour ma santé de m’accorder cette phase indispensable de décompression, de me déconnecter des exigences du travail, des études, et des tumultes de notre vie moderne, de notre installation à Lausanne, et des résonances douloureuses des nouvelles familiales.

    Chaque jour, dès l’heure matinale de 8 h 30 – car il faut bien s’entendre, l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt. Au programme piscine et running. 11 h 30, heure sacrée, entame de l’apéritif — la fête battait son plein. Barbecue en main, vin à volonté, nous nous lancions dans une consommation pantagruélique qui ferait pâlir Gargantua lui-même.

    Heureusement, à 16 heures, pause sacrée : fruits givrés et vodka grenadine, potion magique pour remettre nos estomacs au diapason avant le dernier acte, le repas du soir, véritable récompense d’un effort surhumain.

    Nous sommes tout de même sortis, mes parents souhaitaient faire plaisir à Chloé, qui avait l'année passée émis le désir d'aller déjeuner au club 55. Le club n'est pas très loin de la maison.   Sur la plage de Pampelonne, plage où Brigitte Bardot a tourné le film "Et Dieu créa la femme" Dans cet établissement, vous trouverez une pancarte où il est écrit : "Ici le client n’est pas le roi… parce qu’il est un ami." Mes parents connaissaient très bien Bernard et Geneviève de Colmont mais cela était avant ma naissance ; depuis ce sont leurs enfants qui mènent l'établissement.

    C'est donc en famille avec mes parents et les parents de Chloé venus uniquement pour deux jours (jeudi et vendredi) plutôt que toute la semaine comme le proposaient mes parents. Le Club 55 fut une immense déception, cela n'est plus ce que c'était. Les tentes dans la zone de restauration sont vétustes et auraient besoin d'être restaurées. Le personnel n'est pas agréable, quant aux plats, une catastrophe. Tièdes et insipides !   Ils devraient également mettre des loupes à disposition afin que nous puissions voir les poissons qui sont dans nos assiettes. Non, si vous devez venir à Ramatuelle, le mieux est que vous déjeuniez au self de l'autoroute, cela sera meilleur, et seulement ensuite que vous veniez vous promener sur les plages.

    Malgré ce désastre gastronomique, nos séjours à Nice et à Ramatuelle se sont bien déroulés. Avec mes parents, nous avons longuement discuté des préoccupations de santé qui touchent nos proches. J'ai ressenti une certaine joie en les entendant exprimer leur désir de se rassembler et d'unir leurs forces pour soutenir ceux qui en ont besoin. Ils ont soulevé de nombreuses questions sur les maladies qui les affectent, et j'ai essayé d'éclaircir les subtilités spécifiques à chaque pathologie ainsi que les différents systèmes de soins nécessaires. J'ai pris conscience, avec une acuité nouvelle, que lorsque la santé vacille, elle devient, pour ainsi dire, une affaire familiale. À travers leurs interrogations, j'ai perçu leur quête d'une assistance authentique, d'outils pour comprendre et aider nos proches dans cette épreuve.

    Le dimanche après-midi, nous avons pris l'avion pour Paris, et le lendemain, nous sommes parties installer nos quartiers dans notre nouveau pays.

    A Bientôt,

    Chlo & Til

    lundi 8 septembre 2025

    Vacances 2025 (2ᵉ partie) Transitions, Résilience, Humanité.

    “Entre l'éloignement des proches et les défis professionnels, la vie nous enseigne la patience et la tendresse face à l'inéluctable.”

    Notre vie lausannoise s'organise doucement. Nous venons de traverser notre deuxième nuit de séparation depuis le début de notre vie commune. Dimanche soir dernier ainsi qu'hier soir, comme cela est désormais le cas chaque semaine, j’ai conduit Chloé à la gare de Genève pour prendre son TGV. Son père l’y attendra à son arrivée à Paris, où elle passera la nuit dans le cocon familial afin d'être à l'heure pour son travail le lundi matin. Elle rentrera le lundi soir, ou j’irai la rechercher à Genève pour son retour. Le reste de la semaine, elle sera en télétravail, un mode de vie que Chloé avait particulièrement apprécié lorsque nous vivions à Lille.

    De mon côté, j’entre dans le monde des soins en tant qu’interne en pédiatrie, spécialisée en Médecine Générale (MG). L’hôpital, neuf et prometteur, abrite une équipe chaleureuse qui m’a accueillie avec bienveillance. Une semaine chargée en émotions. Lundi dernier, j'ai reçu mes passes et mes codes d’accès, symboles d’une confiance nouvelle. La direction m'avait également demandé de décorer mon bureau, car oui, ici, les internes ont un bureau ! 

    Je ne suis pas simplement interne, mais médecin interne non diplômé. Cela ne change en rien mes fonctions, certains trouvent le titre plus gratifiant grâce au titre de médecin. D'un autre côté, l'appellation "non diplômé" a un aspect négatif. Je n'aime pas l'idée de mettre la charrue avant les bœufs. Je suis doctorante en médecine, donc interne également, mais je ne suis pas médecin. Je me sens moins à l'aise avec le titre de médecin interne non diplômé, j'ai une impression d'usurpation. De plus, cela crée une confusion, car les patients m'appellent "docteur", ce qui n'est pas le cas. Non je n'aime vraiment pas.

    Cette première semaine m’a permis de réaliser que je passe plus de temps devant l'ordinateur qu'avec les patients. Une grande partie de mon activité sur l’ordinateur consiste à consulter et à saisir des données dans le dossier médical informatisé des patients. C'est un constat triste, car ici aussi, tout n'est pas parfait. Ce poste, qui s’étendra sur une année, me permet d'évoluer à mon rythme et d'établir des liens de confiance non seulement avec les enfants, mais aussi avec leurs familles. C'est un aspect que je n'aurais jamais imaginé voir ainsi encouragé par un directeur d'hôpital. Surtout, ces mots résonnent en moi : « prendre mon temps ».

    En France, nous étions constamment dans la tourmente, tels des soldats en pleine bataille, la précipitation nous entourant comme un brouillard épais. Chaque jour, les heures s’égrenaient dans une médecine de guerre, où il fallait composer avec les moyens du bord et faire preuve d’inventivité face à l’urgence en raison du manque de matériel et de lits. Cela était assez traumatisant, et, dans de telles conditions, il était difficile d'exercer une bonne médecine. Pourtant, devoir quitter la France de mes aïeux parce que celle de Macron n'a pas su nourrir ses enfants praticiens en médecine est difficile à vivre. Mais, il faut penser à sa famille, à la vie que nous désirons vivre, et on finit par partir pour soi. Je n'ai pas fui mon pays, mais un régime et une politique, ceux de Macron.

    Ici, en revanche, nous nous trouvons aux antipodes de cette réalité chaotique, dans un espace où le temps semble s’être arrêté, où l’attention se pose avec la sérénité d’un monde apaisé. Cette invitation à la patience résonne comme un appel à une humanité essentielle dans notre profession. Le directeur me dit souhaiter une homogénéité au sein de son équipe. La journée commence par une réunion avec le chef du service pédiatrique, où flotte une ambiance légère et agréable. Il se passe des choses : il n'y a pas que de la médecine, mais également des échanges humains et culturels. Les journées sont passionnantes, mais aussi harassantes. Maintenant, tout est beau, neuf et rose. Attendons six mois avant de pouvoir tirer un bilan objectif.

    Cette semaine s'est bien déroulée, sans anicroche particulière, même s'il va me falloir un petit temps d'adaptation avec les logiciels et l'administration. Je travaille du lundi au vendredi inclus. Mes horaires pour ce mois-ci de 8 h à 18 h avec 30 minutes de repas. Je serai également tenue d’effectuer une garde de deux jours (week-end) par mois, une obligation modeste au regard de la profondeur de mes anciennes conditions françaises. Mon premier week-end de garde sera le 20 et 21 septembre. Le mois prochain, ma semaine s'étirera de 16 h 30 à 23 h 30, entrecoupée de trente minutes de repas et d'une heure de pause.

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    Les suites cauchemardesques de mes vacances :

    Arrivée à Hossegor, chez mes grands-parents, avec l’illusion naïve que le temps s’écoulerait là, entre leurs murs, dans la douceur des repas partagés et la fraîcheur de la piscine. Mais la piscine était vide, tout comme le silence de leur présence désormais affaiblie. Mes grands-parents, à l’approche de leur centenaire (95 et 97 ans), paraissaient si diminués, comme si le poids des ans avait déjà usé leur énergie et leur autonomie. Je suis consciente qu’ils ont atteint un âge avancé, mais je n’aurais jamais cru assister à une telle évolution — si rapide — de leur santé. Le danger d’infections ou de maladies graves plane constamment, prêt à frapper à tout moment. Pourtant, lors de notre PACS, il y a deux ans, ils semblaient encore en pleine possession de leurs moyens, malgré leur âge, et avaient fait le voyage de Hossegor à Paris. Il me semble essentiel d’être à leurs côtés, de les encourager à bouger, à ne pas sombrer dans l’immobilité, car je devine que cette inactivité ne peut que précipiter leur perte d’autonomie. Lorsque cela arrivera, nous serons proches du syndrome de glissement de la personne âgée. Hélas, la distance me sépare de plus de sept cents kilomètres, et je me sens impuissante face à cette situation. J’ai l’intention d’en parler à mes parents, en espérant qu’ils comprendront l’urgence et la nécessité de venir les voir, et de les aider avant qu’il ne soit trop tard.

    Je devais porter une lourde vérité et en cacher une autre : Charles-Alban (mon oncle), malade. Cette réalité, trop crue, ne devait pas troubler leur fragile équilibre. Je leur mentis donc, leur affirmant qu’ils étaient en pleine forme tous les deux, mais ils avaient beaucoup de travail, avec ce poids d’un amour amer qui doit parfois dissimuler la vérité. Ma plus grande crainte était que Chloé, dans sa spontanéité débordante, laisse échapper ce secret. C’était là, chaque jour, ma bataille silencieuse, une vigilance constante.

    Ils ignoraient tout de leurs états de santé, et lorsque grand-maman apprit cette bonne nouvelle, elle m’offrit un sourire éclairé d’une tendresse que rien ne pouvait éteindre. Grand-papa, avec sa sagesse fatiguée, avoua que cet enfant, malgré le mystère qu’il représentait, inspirait au fond de lui une bonté certaine.

    Fidèle à sa nature généreuse et spontanée, Chloé déclara sans hésiter : « Vous viendrez nous voir à Lausanne quand nous serons installées, nous aurons une chambre d’amis pour vous ! » Grand-maman sourit à nouveau, mais cette fois avec un éclat teinté de mélancolie. Plus tard, elle me glissa discrètement, dans un souffle, qu’elle trouvait Chloé « bien mignonne, mais c’est encore une enfant ». Ce commentaire, tendre et lucide, incarnait parfaitement la complicité silencieuse qui nous unissait, mêlant affection et sagesse.

    Chaque jour, pour leur ménager repos et tranquillité, nous sortions, nous passions toutes nos matinées dehors, nos repas et une bonne partie des après-midi, mesurant notre présence comme une charge à ne pas alourdir. Ils nous confièrent les clés, un gage d’affection et de confiance. Chloé proposa que nous prenions une chambre à l’hôtel. Je lui expliquai : « Nous n'irions pas à l’hôtel, parce qu’ils sont heureux de nous recevoir, même si ce n’est pas parfait. »

    Le mercredi, mes grands-parents avaient tenu à réserver une table au Relais de la Poste. Vers dix heures trente, je me retrouvai en pleine négociation avec Chloé, qui, fidèle à son naturel désinvolte, trouvait que sa tenue un peu chiffonnée et ses cheveux en bataille avaient du charme. « C’est parfait pour un buffet de la poste, et je n’ai pas besoin de douche, je suis propre ! » lança-t-elle avec ce sourire insolent qui me fait à la fois craquer et hurler intérieurement. (Non mais, je rêve !)

    Je dus hausser le ton, lui rappeler qu’il s’agissait d’un repas important, d’un geste d’honneur envers mes grands-parents, et que, oui, on pouvait très bien se doucher avant, se changer, pour respecter cette occasion. Nous avons dû prendre une douche ensemble, afin qu'elle capitule, puis nous nous habillâmes entièrement, prêtes à affronter ce moment avec le soin qu’il méritait.

    Je ne comprendrai jamais pourquoi je dois parfois me mettre en colère pour lui faire comprendre ce qui me paraît être l’évidence même — la simple bienséance. (Franchement, parfois j’ai envie de la gronder comme une enfant, mais je ne suis pas sa nanou !)

    Nos grands-parents s’étaient aussi habillés pour l’occasion, et leur élégance touchante me fendit le cœur. Chloé, fidèle à sa joie communicative, prit quelques photos, immortalisant ces instants précieux. (Pour une fois, j’étais contente de poser devant son appareil !)

    À notre arrivée, la surprise fut grande. Le Relais de la Poste, en apparence simple, se révéla être un établissement deux étoiles Michelin, un lieu de gravité solennelle. Le repas, une véritable évocation de la cuisine du Sud-Ouest, s’apparentait presque à une œuvre d’art, tant la finesse et la richesse de ses saveurs semblaient transcendantes. Pourtant, mes grands-parents, à cause de la fatigue, y goûtaient peu, leur corps alourdi par l’épuisement. Pour ma part, je portais en moi le poids des mauvaises nouvelles venues d’Amérique, et, désormais, mon inquiétude pour mes grands-parents s’ajoutait à ce fardeau. Je n’avais pas beaucoup d’appétit, mon esprit absorbé par la tourmente. Je fis cependant un effort, me contraignant à faire bonne figure, à dissimuler mon trouble derrière un semblant de calme.

    Lors du repas, mes grands-parents, dont le regard portait cette lente et inévitable évidence que la fin approche, nous annoncèrent leur intention de nous faire un très gros virement. (Peu importe de quel côté de l’Atlantique je me trouve, j’entends cette même chanson aux paroles désagréables !) Là encore, comme si cette somme pouvait, d’une manière ou d’une autre, apaiser la charge silencieuse du départ imminent ou atténuer la lourdeur du chagrin que l’on devine sans nom. Ils savent, profondément, que leur heure est proche, et cette conscience semble imprégner chaque mot, chaque geste, comme un poids invisible. Je viens de comprendre que, dans ma famille, lorsque l’ombre de la mort se fait plus présente, il semble de bon ton de recourir à cette dernière démarche financière, comme si l’argent pouvait effacer l’écho de cette séparation inévitable ou laisser une trace tangible dans le temps. Mais moi, je n’éprouve aucun affect avec l'argent, aucun attachement à ces gesticulations matérielles ; elles me paraissent vaines, dénuées de sens face à l’inéluctable.

    De plus, il s’avère que je ne suis pas la plus maladroite en affaires, et de surcroît, j’ai mes parents, ma tante, mon oncle, et désormais eux deux. Bon, je ne suis pas Elon Musk, mais je crois que Chloé et moi devrions pouvoir nous en sortir. Une certitude, je ne suis pas une Tanguy ni un boomerang. Sans compter que Chloé et moi ne dépensons pas l’argent à la légère, sauf peut-être pour notre dernier achat : cette voiture, que je trouve un peu trop ostentatoire dans un monde déjà préoccupé par l’apparence. Cela dit, ce n'est pas non plus une Bugatti Chiron. De toute façon, même si Chloé souhaitait une telle folie, je n’accepterais pas. Cela serait vraiment trop à l’opposé de mes valeurs.

    Il est vrai que, personnellement, l’argent ne constitue pas le prisme principal de mon existence. Je n'ai aucun affect pour lui. Je n’ai pas besoin de mettre en scène notre richesse pour affirmer mon statut social : pour moi, la véritable noblesse consiste à vouloir aider l’autre, à tendre la main sans attendre de contrepartie. Cela me paraît bien plus digne, bien plus vrai.

    À croire que les valeurs que j’ai reçues, celles forgées par mon éducation, ne trouvent plus leur place dans ce monde qui s’accroche à ses illusions. Peut-être cherchent-ils, à travers cette générosité apparente, à laisser une empreinte, à s’accrocher à quelque chose qui leur survivra — comme une ultime tentative de résistance face à l’inexorable qui s’avance doucement, mais sûrement.

    Le chef de cuisine, ami proche de mes grands-parents, vint en fin de repas nous offrir le champagne et célébrer avec nous ce moment devenu rare. Pour eux, cette sortie était un feu d’artifice avant le crépuscule.

    Sur le chemin du retour, nous les aidâmes à retrouver le repos, dans le doux silence de leur maison.

    Le lendemain, nos adieux furent empreints d’une émotion profonde, lourde de silence et de tendresse. Grand-maman, le cœur serré, m’approcha et murmura, avec douceur : « Tu es devenue une très belle jeune femme, portée par de si belles valeurs. Nous sommes immensément fiers de toi. » À ses mots s’ajouta le regard tendre de grand-papa, qui me dit d’une voix empreinte d’affection : « J’espère être là lors de votre prochaine visite, mais je peux maintenant partir, car je sais que j’ai la plus merveilleuse des petites filles. » Ces paroles, si simples mais si pleines de sens, portaient en elles le poids de l’inévitable. Afin de faire bonne figure face à l’adversité, j’ai endossé le masque de la fille enjouée, conservant un optimisme fébrile et un enthousiasme apparent, même si, au fond de moi, la souffrance me consumait et que j’avais énormément de mal à contenir mes larmes. Les jours à venir s’annoncent difficiles, marqués par la fragilité, les luttes silencieuses et ces combats que nous allons devoir affronter.

    Une fois encore, le vol en avion cette fois pour Nice s'avéra vingt-cinq minutes lourdes et pénibles, une épreuve et pour une fois pas due à easyJet. Quelques larmes, trahissant une fragilité, émergèrent de mes yeux. Je n'avais guère le désir de poursuivre ce périple, qui ne semblait être qu'un prétexte à recevoir de funestes nouvelles. Bien que ma formation médicale m'incite à conserver une distance face à la mortalité, je demeure étrangère à la douleur du deuil, à cette souffrance profonde que provoque la perte d'un être cher. Mes pensées, ainsi que mes sentiments, se dirigent vers ce chemin sinistre, angoissant. Une multitude d’émotions m’envahit, submergée par des vagues de chagrin qui surgissent en des instants tout à fait imprévus.

    A Bientôt,

    Chlo & Til


    dimanche 31 août 2025

    Vacances 2025 (1ᵉʳᵉ partie) Amour, Perte, Renouveau.

    “Dans les joies d'une vie, même l'ombre des épreuves éclaire la profondeur de l'amour.”

    J’espère que votre été a été une période de joie, de légèreté et de repos véritable, et que vous abordez cette rentrée avec un esprit clair et renouvelé.

    De mon (et pas notre) côté, cependant, les vacances ont été les plus désastreuses de toute ma vie, malgré un début qui semblait prometteur. Pour éviter les prolongations, je vais diviser en trois volets, le récit de nos vacances de l’année 2025.

    Avant de plonger dans le récit de nos vacances, il convient de s'attarder sur notre actualité.

    Voilà, c'est fait ! Nous avons posé nos valises à Lausanne, où nous aménageons progressivement notre petit havre d'amour (photo à venir), en attendant que les travaux se finalisent dans notre cocon. Chloé et moi avons pris la décision de rester éloignées de notre appartement jusqu'à ce que l’ouvrage soit achevé. Cette résolution nous offre la chance de découvrir la métamorphose de notre espace, tant au niveau de la restauration que de la décoration et du mobilier, nous promettant ainsi une surprise totale. Lorsque nous évoquons cette démarche avec certaines connaissances, une question récurrente s’élève comme une ombre : « Et si cela ne vous plaît pas ? » A cela, nous répondons, avec une légèreté teintée de sagacité : « Eh bien, "Elementary, my dear Watson", nous n’hésiterons pas à solliciter notre architecte décorateur pour qu’il reconsidère ses choix. Et si, par malheur, nous restions insatisfaites, nous n’hésiterons pas à changer d’interlocuteur. Pourquoi devrait-on envisager un problème là où il n’y a que des solutions ? »

    Il est troublant de constater cette inclination chez certains à toujours chercher le détail qui fâche, cette passion quasi maladive. Est-ce pour le conflit ? Le perfectionnisme ? ou peut-être une jalousie sourde ? Je m’interroge sur leur quête de vérité, si tant est qu’ils s’y intéressent vraiment.

    Face à ces interrogations, je me trouve dans un dilemme constant : dois-je faire preuve d’une certaine naïveté à leur égard ou céder à l’envie de les affronter ?  Chloé, quant à elle, adopte une approche plus directe : elle choisit de se détourner de ces âmes que son jugement juge insupportables. Dès le premier article, un sujet sur lequel il serait intéressant de réfléchir. N’hésitez pas à partager vos pensées.

    Revenons à nos vacances :

    Notre passage éclair à Manhattan, dans sa première partie, m’a laissée avec l’impression d’un court voyage, d’une brève rencontre avec Zabeth et le reste de la famille. Nous avons entouré le petit Jordan de cadeaux, de caresses et de bisous, comme pour conjurer la contingence de son existence. Le bébé, le plus beau du monde (évidemment) et d’un éveil précoce, annonce déjà, par l’ampleur de ses pieds, la promesse d’une stature future.

    Ensuite, Chloé souhaitait que nous nous consacrions à une autre forme de partage : une intimité amoureuse, une immersion dans ce Manhattan que je porte en moi, distinct de celui que voit le reste de la famille. En acceptant cette requête, je savais que je me mettais à nu, acceptant d’être photographiée sous tous les angles — car la phase photographique de Chloé n’a pas été diluée par la douceur de l’été. Et pourtant, malgré cette hyper-exposition, nous avons réussi à sortir en famille deux soirs, à respirer un peu de cette ville vibrante, notamment lors du traditionnel concert gratuit au Bryant Park, aux Picnic Performances, où un certain Dez Duron chantait, bien loin de l’éclat de George Benson ou Frank Sinatra. Mais ce moment, simple et modeste, avait sa beauté : il a chanté « How Deep Is Your Love », cette chanson que j’aime, et la température, pour une fois, était clémente — 26 degrés, comme un répit dans cette atmosphère chargée.

    Sinon, dans ce quartier que j’affectionne tant — le Midtown de Manhattan —, nous nous sommes aventurées, en amoureuses, jusqu’à ce tout nouveau gratte-ciel, le Landmark, non loin de la gare Grand Central et du Bryant Park. New York offre tant de panoramas à couper le souffle, mais là, c’est le lieu « chill » du moment. Le rendez-vous prisé des curieux et des touristes. L’endroit est neuf, moderne, presque provocant, avec d’immenses vitrines où l’on peut contempler la ville à 360 degrés, dans une sphère d’infini urbain. On pourrait croire se tenir au faîte du monde, sentant le vertige glisser sur la peau. Même face à cette scène qui déployait toute sa grandeur, Chloé ne put s’empêcher de me supplier de poser pour elle. ( Illustration de cet article)

    Ah, l’amour… cet étrange voile qui obscurcit la vue, et qui, contrairement à l’adage, ne garantit pas une meilleure clarté dans le mariage.
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    Les suites cauchemardesques de mes vacances :

    Le samedi, selon leur souhait, Chloé et moi avons déjeuné avec ma tante et mon oncle. Leur présence m’a profondément bouleversée. Mon oncle, confronté au silence pesant de la maladie — un cancer du pancréas —, sait que ses jours sont comptés. Il traverse ces derniers mois avec une conscience aiguë de sa fin imminente, en un face-à-face silencieux avec la mortalité. Cela dit, dès la première seconde, j’ai remarqué sa jaunisse — un signe visible, évident, témoignant de la gravité de son état. La couleur de sa peau trahissait la lente décomposition de ses fonctions, comme une lueur d’alerte dissimulée derrière ses yeux fatigués.

    De son côté, ma tante n’est guère plus en forme. Souffrant d’une sclérodermie avancée, elle a déjà subi un triple pontage et une opération, et ses épanchements péricardiques persistent (Pour certains, cela  doit-être du  chinoix) malgré tous les traitements. La gravité de sa maladie a atteint un stade très avancé. Les médecins avaient envisagé une hospitalisation, mais elle a refusé, préférant se laisser mourir, consciente que son mari vit ses derniers instants. Leur discours, empreint d’une acceptation non rationnelle, tourne autour de cette idée absurde de mourir et de partir ensemble. (N'importe quoi ! GGggrrrr et re GGggrrrr)

    Ils souhaitaient faire la connaissance de Chloé, bien qu’ils l’aient déjà rencontrée — lorsqu’elle n’était qu’une enfant d’environ dix ans —, et nous offrent un virement déraisonnable en guise de cadeau de noces. Ce présent, destiné à nous deux, symbolise leur affection et marque cette étape importante de notre vie commune.

    Par ailleurs, ils m’avaient également convoquée pour me faire signer tous les papiers relatifs à l’héritage. Celui-ci consiste principalement en appartements dispersés entre New York, l’outre-Manche (Londres, Édimbourg) et la France (Paris, Nice). Mais la majorité de leur patrimoine financier réside dans des actions chez Johnson & Johnson.

    Je suis donc devenue l’héritière de ces biens, mais surtout de ces actions, qui donnent un droit de vote lors des assemblées, ce qui me permet de participer à certaines décisions. Ce n’est pas une majorité, mais une part significative, suffisante pour garantir notre sécurité financière, à Chloé et à moi, à long terme.

    Grâce à cette transmission, ils souhaitent que je bénéficie d’un régime fiscal avantageux, de revenus locatifs et de dividendes issus de ces actifs, qui dépassent largement nos deux salaires. Ce geste, fait de leur vivant, symbolise leur confiance en moi et leur volonté que je poursuive leur héritage, tout en m’assurant une autonomie réelle pour moi et mon couple.

    Grâce à leur immense générosité — même si, avec mes parents, la question matérielle était inexistante —, cette opportunité m’offre une véritable autonomie. La pensée que ma tante et mon oncle s’éloignent, quittent cette vie, m’assaille d’une tristesse profonde, assombrissant ces dernières semaines. Je vais devoir faire face à cette épreuve, avec un cœur en tempête, empli de culpabilité : celle d’avoir peut-être été trop distante, ou pas assez généreuse, ou encore de m’être sentie exclue de leur souffrance alors que je me prépare à devenir médecin, et que nous aurions pu en parler ensemble.

    Je ne peux m’empêcher de regretter de ne pas avoir cherché à comprendre pourquoi ils s’étaient éloignés de moi. Ma tante et mon oncle sont comme moi : secrets et réservés, je ne peux pas leur en vouloir. Ils ont toujours préféré garder pour eux le poids de la maladie, refusant de le partager ou de m’impliquer davantage. Sans doute voulaient-ils nous protéger, mais cette solitude qu’ils ont choisie — que j’ai parfois ressentie — laisse un goût amer.

    En prenant l’avion pour notre retour en Europe, j’ai ressenti un nœud au ventre et une gorge sèche. La conscience de la brièveté du temps qui leur reste, et la certitude que ces maladies ne laissent aucune chance, m’ont forcée à accepter que le chemin qui nous reste est court — peut-être même trop court. Il y a un risque élevé que nous devions revenir à Manhattan avant l’été prochain, pour un, voir les deux enterrements.

    Affirmer que nous aurions préféré une fin plus douce sur Manhattan serait un doux euphémisme : ce qui s’est joué là-bas, ce qui s’est brisé, dépasse la simple douceur d’une fin. C’est la lourde vérité de notre condition humaine, la confrontation douloureuse entre nos illusions et les réalités impitoyables.

    Le voyage s’étira à l’infini. L’insomnie me tenaillait, incapable de trouver le moindre repos, tourmentée par la lourde nouvelle qui pesait sur mon esprit. Mon seul désir ardent était de poser le pied à terre, de courir, de hurler pour évacuer cette douleur qui me consumait. Ce qui me soutenait, ce qui m’empêchait de céder complètement à la détresse, c’était l’espoir que, bientôt, je serais dans les bras de mes grands-parents, ces figures rassurantes dont la tendresse, je l’espérais, adoucirait le fardeau qui m’écrasait.

    A Bientôt,

    Chlo & Til 

    mercredi 30 juillet 2025

    Journal de bord 30/07/2025 Routines, improvisation, résilience

    “L’audace et la patience façonnent notre chemin.”

    Durant toute la semaine, nous avons consacré nos moments de liberté à parcourir nos restaurants préférés, comme si cette habitude était une manière de préserver une douceur essentielle dans un quotidien marqué par le travail. Chloé reviendra chaque semaine pour ses affaires, poursuivant ainsi une partie de sa routine parisienne, tandis que, de mon côté, je n’envisage pas de regagner la capitale avant quelque temps. La distance impose ses silences, mais aussi ses habitudes, que je vais devoir bâtir à Lausanne.

    Je vous ai toujours adressé mes vœux de vacances, accompagnés d’une jolie photo ou d'un dessin de Chloé. Cette année, je vais oser l’audace : pourquoi ne pas vous proposer des destinations où personne ne pense aller ?

    Stolipinovo (Bulgarie), Sarcelles (France) ou Thionville (France), histoire de changer des plages de sable fin et des stations balnéaires. Et, puisque la situation géopolitique me contraint à la prudence, évitons Golianovo (Russie)— même si l’idée de vous voir offrir un billet en aller simple à votre belle-mère pour ces horizons improbables vous paraît presque séduisante.

    Côté météo, c’est un peu comme jouer à la roulette russe : canicule écrasante ou pluie qui ne s’arrête jamais, à moins que la température ne décide de plonger brusquement, vous laissant désemparés.
    La voiture, elle aussi, participe à cette comédie dramatique : panne sur l’autoroute, remorquage, et un garagiste qui, entre deux cafés, vous annonce qu’il faudra attendre deux jours, mais que l’hôtel d’à côté, avec vue sur le garage, est « très charmant » — tout un programme, n’est-ce pas ?

    Une fois arrivés, il faut laisser la voiture à un kilomètre, dans un quartier qui a été transformé en zone piétonne à cause des cadavres de voitures brûlées et des routes défoncées. Vous portez vos valises sous un soleil de plomb ou sous une pluie torrentielle — au choix —, pendant que les enfants du quartier jouent avec des bouches d’égout, que les adolescents sifflent en vous regardant passer, et en vous criant : « Il est où le voile, sale P..E ? » Au passage, vous avez-vous repéré le point de deal ? » Tout cela, dans une harmonie presque poétique. La France d'aujourd'hui nest-elle pas belle ?

    L’entrée de votre humble logement réserve son lot de surprises : pas d’ascenseur, un septième étage, et la lumière du couloir en grève — sauf si vous appréciez la sensation d’être dans un rêve éveillé. Le propriétaire, lui, vous tend les clés en exigeant une caution en liquide — comme si cela garantissait la paix ou la décence. La porte, mal ficelée, ne ferme pas totalement, mais il vous assure que « ce sont tous des amis ici, rien à craindre, aucun vol. ».

    Et là, commence la véritable aventure : déblayer les débris laissés par les précédents locataires, écouter la voisine du dessous en train de regarder la télévision tout en chantant, et subir les hurlements de la voisine d’en face — qui, parlant une langue étrangère, crie sur ses enfants h24 comme si elle voulait déverser toute sa colère sur le monde. La douche commune au fond du couloir, n'êtes-vous pas dans un spectacle absurde ?

    La nuit, vous l’imaginez en héros : assis dans une chaise face à la porte, un canif à la main, prêt à faire face à l’intrus — ou à l’ombre de votre propre paranoïa.

    Le lendemain, en partant, vous laissez tout derrière vous : adieu caution, les clefs sur la table, le cœur un peu plus léger. Mais voilà que, de retour chez vous, c’est la douche froide : cambriolés, vous vous rendez compte que la vie vous joue un drôle de tour, et que l’illusion de sécurité ne tient qu’à un fil.

    Quant à ceux qui restent chez eux, la fête n’est pas finie : le chien de votre sœur, qui fait ses déjections partout, l’iguane du cousin qui prend des crises d'asthme, les chats qui louchent de votre voisine, qui ont tout cassée — et la tortue, qui, à force de traîner à deux à l’heure, a réussi à vous distancer et impossible de la retrouver. Sans oublier la porte de la boîte aux lettres du voisin que vous avez cassé, et chez vous le congélateur et l’ordinateur en panne en plein été, et, cerise sur le gâteau, des toilettes bouchées. Le feu d'artifice, c’est que vous vous êtes coincé dans l’escalier, sans téléphone, à vous demander si la vie ne vous joue pas une valse de trop. Mais, après tout cela, n’est-ce pas la preuve que, malgré tout, il faut continuer ? Alors, bonnes vacances.

    Je vais cesser mes sottises et revenir à notre quotidien :

    Le mois touche à sa fin, et ma chère compagne achève, à la fin de cette semaine, son rôle de directrice générale au sein de la bijouterie. Une étape de plus dans cette vie faite de petits départs et de patience, que chacun doit apprendre à accueillir avec gravité.

    De mon côté, je me trouve plongée dans la formation : « Comment écrire sa thèse ? » Ces quatre journées consacrées à l’art de la rédaction ont été pour moi une révélation. Elles ont permis de clarifier des pratiques insaisissables, souvent omises dans les conversations avec mon directeur de thèse, mais essentielles à la construction d’un travail de recherche. Permettez-moi d’en esquisser rapidement les grands traits, si cela peut vous éclairer.

    J’ai compris que l’écriture se décompose de quatres phases mais en deux mouvements fondamentaux : d’un côté, la créativité et la synthèse, où l’on va droit à l’essentiel, sans se perdre dans les détails ; de l’autre, l’analyse critique, qui explore chaque nuance, chaque argument, en structurant la pensée, en précisant la démarche. Deux étapes complémentaires qui, si elles sont bien équilibrées, forgent un texte à la fois fluide et rigoureux.

    La troisième étape consiste à polir la langue et le style. L’objectif est d’alléger, de varier, de préciser ce qui a été écrit, afin que chaque mot porte plus de sens, que la lecture devienne un plaisir autant qu’un effort de compréhension.

    Enfin, la dernière phase, souvent la plus ardue, concerne la mise en page, la vérification des références, la bibliographie et la ponctuation — cette dernière, qui doit être cohérente tout au long du texte, pour que l’ensemble soit unifié dans sa précision.

    J’ai pris conscience de l’apport précieux du blog, de ce don que vous m’offrez en étant mes lecteurs et amis. Grâce à vous, j’écris chaque jour. L’écriture n’est pas seulement un devoir, c’est une pratique, et comme toute pratique, elle réclame une formation continue. Vos encouragements quant à mes progrès me touchent profondément. Car il est vrai : c’est en forgeant qu’on devient forgeron, et c’est en écrivant que l’on gagne en maîtrise, en professionnalisme, en authenticité. Nos articles hebdomadaires, que je rédige de façon empirique, prennent aujourd’hui une clarté et une précision que je n’aurais pas cru possibles.

    Je vous suis également reconnaissante pour chaque retour, qu’il soit positif ou critique, mais toujours dans une optique constructive. C’est en confrontant mon écriture à votre lecture que le texte s’améliore, que la pensée se précise. L’écriture n’est pas une tâche solitaire : c’est une aventure collective, dont vous faites partie.

    A vous tous, je vous souhaite de belles vacances, sans trop de sagesse, mais avec un maximum de plaisir et de liberté ! C’est avec joie que nous nous retrouverons début septembre. Bisesssssss à tous.

    A Bientôt,
    Chlo & Til 

    lundi 21 juillet 2025

    Journal de bord 23/07/2025 Dynamismes, Révélations, Mélange

    “Les rencontres tissent le fil de nos rêves et de nos réalités.”

    La période où Chloé s’emploie à photographier se poursuit. Je me demande si elle ne rêve pas de devenir reporter de guerre, ce qui expliquerait peut-être son entrain à capturer l’horreur. Etant son seul sujet, son modèle privilégié, comme si l’objectif pouvait révéler la beauté enfouie en moi. Mais en vérité, je suis surtout le témoin involontaire de ses efforts pour saisir ce qui, en réalité, n’est pas si facile à capturer : mon propre ridicule devant un appareil photo.

    Encore une semaine, et Chloé aura achevé sa tâche de directrice de la bijouterie. Quant à moi, je suis déjà plongée dans l’attente de nos vacances. Entre les invitations chez nos amis et nos restaurants favoris que nous tenons à fréquenter avant notre départ, il paraît évident que notre balance risque de nous dire des mots désagréables, étant donné que notre poids risque de s’en ressentir. Mais qu’y puis-je ? Il est si difficile de satisfaire tout le monde, surtout lorsque l’on a affaire à une balance aussi rabat-joie qu’elle ! Chloé suggère que nous lui retirions la pile avant de monter dessus, juste pour lui couper la parole. Je crois que nous allons opter pour l’omission de la pesée : ce sera plus simple, et cela nous permettra de profiter pleinement de nos congés. Nous ferons le point à notre arrivée à Lausanne. L’avantage, c’est que nous ne pourrons que progresser !

    Avec Chloé, on aurait voulu commencer tout de suite dans notre appartement. Nous nous étions imaginé les premières nuits, avec des gestes tendres, les pièces à apprivoiser. Mais l’appel est tombé ce matin. L’architecte a parlé vite, d’une voix neutre : deux mois de retard. Il s’excusait, comme s’il fallait encore y croire. Je n’ai rien dit. J’ai pensé : ce sera décembre, au mieux. Ce genre de délais, je les connais. Il y a toujours quelque chose qui coince, toujours un imprévu qu’on appelle "normal". Alors nous attendrons. Encore. Et ce qu’on croyait tout proche s’éloigne un peu, comme un décor qu’on remonte en fond de scène. C’est frustrant, bien sûr. Mais le père de Chloé nous avait prévenues.

    En attendant, nous allons rester dans l’anticipation du départ, une légèreté particulière. Organiser nos vacances nous donne l’illusion que tout peut s’ordonner. Le surcroît de tâches ne pèse plus, il devient presque complice de notre hâte. Tout est prêt maintenant : billets réservés, horaires fixés, nos hôtes avertis de notre arrivée, de notre départ — comme si, un instant, le monde acceptait de se plier à notre tracé.

    Voici le programme que nous avons réussi, Chloé et moi, à établir :
    Six jours à Manhattan, du 4 au 10 août — hélas, le temps file, la durée se réduit. De plus, mon oncle, frère cadet de mon père, et ma tante souhaitent m’entretenir de choses importantes, m'ont-ils dit. Je ne sais pas pourquoi… Ils voyagent beaucoup, et mes visites aux Etats-Unis coïncident rarement avec leur emploi du temps. Mais au-delà de ces obligations familiales, c’est surtout l’émotion de retrouver Zabeth et ma famille de cœur qui m’agite. Je suis impatiente d’embrasser Holly, la mère de Zabeth, et de rencontrer Jordan, le petit garçon de Cassy, la sœur de Zabeth, et de John, l'heureux papa. Nous arrivons les valises pleines de cadeaux.

    Notre retour en Europe est prévu pour le 11 août, atterrissage à Biarritz. Nous avons une location de voiture pour rejoindre Hossegor, pour rendre visite à mes grands-parents, pour deux jours. Nous rendrons ensuite la voiture et prendrons un vol le 14 août vers Nice, où nous retrouverons les grands-parents de Chloé. Une autre voiture nous y attendra. Là encore, nous resterons jusqu’au 17. Enfin, nous entamerons la dernière étape de nos congés : si tout se passe comme prévu, nous retrouverons nos quatre parents à Ramatuelle, dans la maison de campagne, pour une semaine. Le dimanche 24, nous repartirons pour Paris, récupérer la voiture et nos affaires, avant de prendre la route vers notre nouveau meublé helvétique. Il nous faudra bien une semaine pour prendre nos marques avant de commencer mon service d'internat en première année.

    Seul un emploi du temps précis peut nous permettre de renouer avec ceux que nous aimons, avant de les quitter. C’est à la fois ironique et révélateur : à l’approche de notre départ pour la Suisse, tant de personnes tiennent soudain à nous voir une dernière fois. On dirait que nous partons pour un exil lointain, presque inquiétant. Chloé, avec son humour mordant, m'a fait remarquer qu’en toute logique, ce devrait être à nous de solliciter ces adieux. Après tout, c’est nous qui les quittons. Nous partons vers une stabilité, un avenir structuré ; eux restent ici, en France, un pays qui décline lentement, rongé par une insécurité devenue banale, de plus en plus disloqué, comme si une forme de chaos silencieux s’y installait. Chloé dit qu’on se croirait parfois dans un pays du tiers-monde. Et il faut bien reconnaître qu’entre les petits trafics, les visages fermés, les tensions rampantes, il y a quelque chose qui ne tourne plus rond sur le sol de mes ancêtres.

    Comme prévu, je suis descendue à Lausanne vendredi, pendant que Chloé, retenue à sa bijouterie, s’affairait à ses responsabilités. J’ai pris le train. Le trajet m’a permis de réviser, de mettre de l’ordre dans mes notes, de vagabonder un peu dans mes pensées. J’avais mon laptop sur les genoux, mais je crois que j’ai surtout apprécié ce moment de calme, suspendu entre deux points de vie.

    J'avais fait parvenir aux propriétaires une photo de moi (pas difficile à trouver avec Chloé) afin qu'ils me reconnaissent. A mon arrivée, je les ai tout de suite aperçus. Ils m’attendaient sur le quai, droits, souriants. Un couple, sans doute dans les soixante-quinze ans, en bonne santé, au port assuré. Il y avait chez eux une élégance certaine — discrète, fluide — semblable à celle de mes parents. Cette manière de se tenir, de parler, de recevoir, qui n’a nul besoin d’artifice. Un raffinement qui s’impose sans bruit, non par ostentation, mais par habitude — et ici, décliné avec une simplicité plus douce encore.

    Dès les premiers instants, tout fut facile. Les échanges étaient fluides, les sourires sincères, une politesse non feinte, presque joyeuse.

    Je me suis excusée auprès d'eux de l’absence de Chloé. Elle aurait aimé être là, évidemment, mais elle dirige une grande bijouterie de haute joaillerie ; son emploi du temps ne laisse que peu de marge. Madame a eu ce petit rire complice, puis cette phrase :
    — « Le travail est la meilleure des excuses ! »

    Nous avons visité l’appartement. Il est petit, oui. Mais magnifique. Entièrement rénové, baigné de lumière, avec une sobriété qui me parle. Tout est propre, juste, apaisant. Un peu moins bien situé que notre appartement, mais à côté du tramway.
    Très vite, j’ai senti que nous parlions la même langue. Pas seulement le français, non : une langue invisible, faite de retenue, de curiosité bienveillante, de respect simple. Pas de doute, nous possédons les mêmes codes.

    Nous avons évoqué nos familles respectives. Ils m’ont confié, sans emphase, appartenir à la noblesse suisse. Ils se sont montrés sincèrement curieux de mon nom, de la double particule, de ma famille, de mes projets professionnels. Mon désir de devenir pédiatre, mon engagement dans l’humanitaire semblaient les toucher. J’ai dû leur dire, avec un certain embarras, que je ne méritais pas tant d’éloges. Ce n’est pas un mérite, non. C’est un devoir. Mon éducation m’a appris cela : que lorsqu’on a reçu beaucoup, il faut donner sans attendre de retour.

    Quand j’ai voulu leur remettre un chèque — simple précaution, pour d’éventuelles dégradations accidentelles, ou simplement par souci de correction —, ils l’ont refusé avec une fermeté tranquille.
    Plus tard, en racontant la scène à Chloé, sa réponse a fusé, moqueuse :
    — « Coool, je vais pouvoir peindre sur les murs ! »
    Elle plaisantait, bien sûr. Mais j’ai souri, en l’imaginant déjà choisir la couleur. N'oublions pas cependant qu'à Lille Chloé avait peint sur une porte et un dessin dans les toilettes.

    Ils m’ont remis deux jeux de clés. Le geste était simple, mais je l’ai reçu comme une marque de confiance, presque intime.

    L’administratif réglé, ils ont proposé de prendre un apéritif — « bien mérité », a précisé Monsieur avec un clin d’œil. Nous sommes descendus à la brasserie du coin. Il a fallu insister pour que je puisse leur offrir ce verre, ce petit moment partagé, que j’ai pris soin de ne pas banaliser.

    Avant de nous séparer, Madame m’a lancé, avec cette douceur légèrement solennelle :
    — « C’est agréable de voir une jeune femme porter autant de valeurs et de responsabilités avec naturel. » (Depuis, je crois que mes chevilles ont enflé.)

    Je n’ai rien répondu, juste offert mon plus beau sourire. Après tout, ce sont eux qui nous ouvrent les portes de leur pied-à-terre, sans exiger la moindre contrepartie. Cette générosité-là, si rare aujourd’hui, mérite qu’on sache simplement la recevoir avec gratitude.

    Je me suis laissée un peu aller à flâner dans Lausanne, où j’ai déjeuné d’un plat du jour dans une brasserie. En début d’après-midi, il fallait reprendre le train pour Paris. Sans vouloir me plaindre, quatorze heures de voyage dans une seule journée, cela fait beaucoup !

    Je suis arrivée à bout de forces, le corps vidé, à peine le temps de me délester de ma fatigue par une douche rapide, puis de changer d’habit, car le soir même, nous étions invitées chez Pamplemousse Rose, accompagnées de quatre de ses amies que nous ne connaissions pas.
    Au menu : apéro dînatoire puis pizzas, salade verte avec des oignons blancs, et pour finir glace vanille et Pamplemousse Rose avait fait tremper des raisins de Corinthe dans du rhum. Et elle a ajouté une lampée de rhum et de sucre de canne sur la glace (nous aurions dû éviter le rhum !). Pour accompagner ce repas, du vin rosé frais, un festin simple mais prometteur. J’avais soigneusement acheté la quantité de vin requise par notre hôtesse, car Pamplemousse Rose savait pertinemment que mon choix serait différent des mixtures habituelles qu'elle achète. Cette fille a toutes les qualités sauf pour le choix des vins. Elle choisit le vin à la joliesse de la bouteille ou de l'étiquette. (no comment !)

    En partant de chez mes beaux-parents, Chloé m’ordonna : « Je prends les fleurs, tu t’occupes des bouteilles. » Ne me ferais-je pas avoir ?
    Nous sommes donc arrivées chargées de trois jéroboams Garrus Château d’Esclans Rosé 2000, c'est un cépage Grenache noir, ainsi qu'un énorme bouquet de fleurs acheté par Chloé. (Oui, nous faisons concurrence à Romain.)

    Pamplemousse Rose avait accompli une tâche remarquable, une œuvre de finesse et de goût qui méritait toute notre reconnaissance. Lors de l’apéritif, une multitude d’olives, de variétés diverses, provenaient d’un traiteur italien. Il y en avait certaines au piment, d’autres au poivron, mais surtout ces olives marinées aux zestes d’agrumes, qui semblaient évoquer une douceur à la fois vive et subtile — un véritable enchantement pour les sens.

    Les mets se succédaient, déployant une palette de saveurs et de textures : deux verrines gourmandes, chacune différente des amuse-bouches classiques, des rouleaux de printemps aux crevettes, des feuilles de vigne, mais aussi cette découverte inattendue, des rouleaux de tortilla aux cornichons, que j’ai vraiment adorés. Comme une petite victoire au sein de cette symphonie gustative. Mon rosé, léger et fruité, se mêlait à cette ambiance, et tous semblaient l’apprécier, telle une compagne discrète de cette harmonie.

    Impossible de tout savourer, tant la beauté des petites bouchées invitait à la délectation ; vouloir tout manger, c’était renoncer à la pizza.

    Les pizzas, cuites au feu de bois dans une authentique pizzéria, furent un délice à chaque bouchée. Était-ce parce que j’avais peu déjeuné, ou simplement parce que l’instant s’était révélé propice à la jouissance, que je me délectai avec un tel enthousiasme ? Chloé, ayant déjà beaucoup mangé et bu à l’apéritif, me déposa, comme à son habitude, la moitié de sa pizza dans mon assiette.

    La salade verte, agrémentée d’oignons blancs, était d’une fraîcheur éclatante, son croquant évoquant cette simplicité essentielle que la patience — secret de Pamplemousse Rose : cette longévité dans l’eau — avait révélée, presque un secret. Enfin, le dessert : ces raisins de Corinthe, trempés dans le rhum, constituaient une merveille, une douceur pleine de promesses, une invitation à la contemplation.

    Prenant conscience de cet instant de bonheur que nous partagions, nous avons alors abordé la question de la valeur du temps. Un sujet que l’on pourrait qualifier de « marronnier », me direz-vous, mais dans la bouche de nos échanges oscillait entre clichés et lapalissades : le temps qui passe inexorablement, du temps qui nous file entre les doigts. Hier encore, nous étions au lycée. Chaque seconde qui s’écoule ne reviendra jamais. La valeur du temps ne se mesure pas en argent, les moments agréables semblent passer trop vite, qu'il vaut mieux passer une heure pleinement présente et engagée que plusieurs heures dispersée et distraite, et j'en oublie…
    pour en arriver à la conclusion : Le temps nous échappe ! (Wow… ah, quand même ??? Je sens que c'est ma soirée qui va être longue ! (Je retrousse mon nez !)
    Alors soit, ce sont des vérités indéniables, certes, mais il n’en demeure pas moins que tout cela, en somme, ne présente aucun intérêt ou si, lorsque vous avez neuf ans et que cette conversation se déroule dans une cour de récréation. Mais entre vingt-cinq et trente-cinq ans, toutes diplômées d'études supérieures, cela est effrayant, non ?
    Lorsque j'ai évoqué saint Augustin et Socrate pour élever un peu le débat, en particulier le discours de Socrate à travers les dialogues de Platon, ou Heidegger sur sa réflexion profonde : « Être et temps ». Pamplemousse Rose a immédiatement dit : « Les filles, n'entrouvez pas cette porte avec Til sinon, dans cinq minutes, nous aurons toutes l'air d'idiotes ! » Cela a fait sourire tout le monde…
    Alors j'ai pris ma voix de petite fille pour leur dire : « Oui, mais bon, de toute manière, le temps représente la vie elle-même. Et sinon, il fait beau chez vous ? » Une explosion de rire vint déminer ce petit temps de tension.

    Et là, Pamplemousse a lancé : « Racontez-moi une de vos meilleures anecdotes, pour qu’on rigole. » Et voilà la soirée partie, dans un tourbillon de souvenirs, de rires et de blagues, mais bien loin de la philosophie. Chloé, elle était déjà appuyée contre mon épaule prête à dormir.

    Je n’ai pas pu m’empêcher, un instant, de me demander si j’étais une casse-ambiance ? En réalité, je pense que c’est un problème de dynamique de groupe. Ce sont mes interactions qui ne fonctionnent pas. Je vais mettre cette réflexion de côté pour l’instant et demander à Irène si elle connaît des ouvrages sur ce sujet. A la fin de cette soirée, Chloé, qui s'était réveillée, s’efforçait de me convaincre que le rosé n’était pas si rosé que ça ! (Mais bien sûr… ma chérie, l'expérience m'a appris : ne jamais contredire une chérie ivre !).
    Disons que Chloé avait festoyé avec générosité, mais elle n’était pas la seule à laisser ses inhibitions de côté.
    Camille, titubant, désirait se rendre « aux ouatères closètes » (mettez l'accent tonique où vous pouvez !), tout en affirmant sur un ton complice : « Non mais, parce que, tu comprends, j’ai des choses à faire, mais c'est top secret ! » (Ce qui, évidemment, se passe de tout commentaire !) jusqu'au moment où elle se coucha par terre car « c'est mieux là, le frais par terre, vous voulez pas venir me rejoindre ? Ben oui, parce que la chaleur, ça monte, c'est connu !». Je lui ai donc répondu, avec un sourire malicieux : « Si cela ne te dérange pas, je vais attendre un peu avant de me rouler par terre, comme un animal. »
    Quant à Francine, si captivante en début de soirée, une fois saoule, elle se révélait aussi intéressante qu'une râpe à fromage sans picot : elle baragouinait des choses incompréhensibles, toutes ses phrases se terminant par : « Chuuuut, on s’comprend ! » (Je ne suis pas sûre, mais soit…) En allant aux toilettes, elle se regarde dans le miroir de l'entrée et explose de rire. (ok...)
    Enfin, Audray, son tee-shirt avait mystérieusement disparu (Houdini sans doute), en soutien-gorge et sa jupe remontée jusqu’aux oreilles, me déclamait sa flamme : « J’vais dire, j'vais vnir t'faire un p'tit bisou, parce que t'es ma pote, j’t’aime bien, la de la machin chose de bidule. » Ma réponse immédiate : « Mmm, désolée, je crois que j’ai mon herpès contagieux qui vient de pointer son nez. » Mais elle ne capitula pas aussi facilement : « Non mais hé, j'suis pas bourrée, juste un peu joviale ! » (Joviale… oui, c'est le mot que je cherchais !) Et pour finir, elle voulait me parler en anglais, car subitement elle est devenue bilingue. Enfin, je vous laisse apprécier la suite… Elle me dit « Never stop looking for a pines ». Wow… Je sais que le vin désinhibe, mais là… Je vous laisse imaginer ma tête ! (I must have been blushing all over at such coarse language!) Et que dois-je faire de cette information ? Si je traduis, elle vient de me dire : « Ne cesse jamais de chercher un pénis ! » Puis, soudain, je me suis mise à rire aux éclats. Pamplemousse Rose m’interpella : « Toi aussi le vin vient de te montrer à la tête ? » Alors, je lui explique ce que je viens de réaliser, ce qu'Audrey voulait nous dire : « Never stop looking for happiness » que je pourrais traduire par : ne jamais arrêter de chercher le bonheur. Ah, les subtilités de l’anglais : à ne pas prononcer les "H" aspiré, cela peut s'avérer fort dangereux !

    Elles sont toutes restées dormir chez Pamplemousse Rose. La seule inquiétude de Pamplemousse Rose : « Vais-je avoir assez de bassines ? » (A rajouter sur notre future liste d'achats pour Lausanne : des bassines !)

    Chloé et moi, ayant préféré la sécurité d’un taxi, rentrâmes, un peu étourdies, j'avais un rire qui ne voulait plus s’arrêter en repensant à Audrey.

    Ce repas, véritablement réussi, m’a procuré une grande jouissance, et j’ai sincèrement reconnu l’attention délicate que Pamplemousse Rose a déployée pour que chacune de nous se sente honorée et chérie.

    Une fin de nuit amusante, vous n’imaginez pas le nombre de choses que j’ai apprises dans la dernière heure (oui… assez incroyable), sauf que je ne suis pas certaine d’en avoir tout saisi… c'est que je suis novice en la matière. Je ne connaissais pas ces fins de soirées, mais, franchement, ça ne va pas forcément me manquer.

    Le lendemain, Chloé travaillait, donc nous nous sommes levées tôt. A son réveil, je l'ai embrassée tendrement comme chaque matin, et elle me dit : « Arrête de m'embrasser, ça résonne dans ma tête ! » Sachant que nous éliminons 0,10 g d'alcool dans le sang par heure, que Chloé devait être entre 2 et 3 g, il n'y a donc aucune chance que ma chérie soit sobre aujourd'hui à son travail… Voilà comment, après une nuit d'ivresse, certaines ont plus de mal à se lever que d'autres, et l'autre est déjà en vacances ! Hé ! Hé ! Hé !

    A vous tous, je vous souhaite une excellente semaine.

    A Bientôt,
    Chlo & Til